Un nouveau regard sur Le Pen : le sien
« Mes grands-parents ne savaient pas lire mais surent donner une vie décente à leurs enfants. Ma paysanne de mère était élégante et fière,
mon père, patron pêcheur taciturne, avait navigué pendant la Grande guerre, à treize ans, mousse sur un cap-hornier, ces cathédrales de toile et
de bois qui affrontaient les quarantièmes rugissants. A la maison, il n’y avait pas l’eau courante mais on aimait sa famille, son pays et Dieu – et la
Bretagne aussi, avec ses îles, ses navires. L’instituteur et le curé nous apprenaient à les chanter ensemble. En somme, j’étais un petit Breton
heureux dans la grande France.
Puis vint la Seconde guerre mondiale. Le père est mort, la France était blessée, des curés m’ont dégoûté de Dieu. C’est alors que j’ai découvert
la folie des hommes, Paris, l’université, l’Indochine, l’Assemblée nationale, l’Algérie. J’eus une épouse et des filles. La vie s’offrait, tantôt
magnifique, tantôt désolante. Le petit Breton avait grandi, la France rapetissé. Pour la relever, j’ai choisi le combat politique. »